L'homme est debout, caressant le cou d'un chameau. Il a l'air d'observer à côté de lui deux vaches à longues cornes qui se battent.
La main de l'artiste ou du journaliste qui a gravé ça a à peu près 4 000 ans.
Je trouve cette gravure vernissée par le temps dans le d'jbel Bani.
Voilà longtemps maintenant que je nomadise dans cette région habitée par le seul esprit de la révélation de Charles de Foucauld. En plus de la beauté et la grandeur des sites, la qualité des silences, la versatilité "positive" de la lumière, il y a la merveilleuse et bienfaisante simplicité des hommes qui y vivent. Tout ça effectivement permet de remplir le vide saharien d'un doux courant divin, d'une source fraîche de spiritualité
La nuit est tombée et mon dromadaire c'est endormi près de moi, confiant. En attendant qu'il prenne son quart je m'arrête sur cette expression : remplir le vide ... remplir le vide : éternelle réaction humaine ; remplir quel vide ?
Le miroir Sahara reflète mon image et je n'y trouve pas trace d'un quelconque néant.
- Ho la la voilà encore un néo narcissique qui n'a guère de problèmes avec son ego !
Non, mais des années de vie à aimer simplement, savoir dire oui ou non honnêtement, reconnaître où et quand je me trompe, supporter les remords et les regrets, partager mes joies, tout ça fait un terreau fertile qui comble efficacement le pot de terre que je suis.
Le feu s'est éteint, Vénus est au-delà du zénith et mon chameau se réveille pour prendre la garde.
Doucement je m'endors en me demandant encore si j'aurais les mêmes pensées si ma vie était autre chose : vouloir devenir une star ou une gravure de mode, avoir un écran plat ou une voiture 16S HDI GPRX etc, respecter les conseils judicieux des magazines et ne jurer que par mon supermarché !